Pour quatre comédiens-chanteurs, trois musiciens et un choeur
D'après le roman d'Ahmadou Kourouma
Adaptation et mise en scène de Sugeeta Fribourg,
Musique d'Alain Huteau
Direction musicale : Jean-Yves Aizic
Avec : Damien Bigourdan, Serge Djen, Anne Le Coutour, Pol M'Belé
Production : Le Grand Théâtre de Reims - La Chouette en Liesse
Avec le soutien de : Arcal, Fonds de création lyrique, Arcadi
En attendant le vote des bêtes sauvages est l'adaptation d'un roman d'Ahmadou Kourouma qui a obtenu le "Prix Inter" en 1999. C'est une saga, entre le conte et la chronique, qui évoque et fustige la situation en Afrique. Avec une écriture fascinante, un humour ravageur et désinvolte, l'auteur dépeint la montée au pouvoir de Koyaga, figure archétypale de ces dictateurs machiavéliques qui pullulent sur le continent africain.
Koyaga est-il aimé de son peuple ? C'est une évidence, chacun le sait !!! La preuve ? Il est plébiscité par le peuple. Et si ce peuple venait à lui faire défaut… Les bêtes sauvages, elles-mêmes sortiraient de la brousse pour voter en sa faveur.
Note d'intention
Par Sugeeta Fribourg
En attendant le vote des bêtes sauvages est une critique lucide contre la dictature menée par des hommes sans scrupules sur la terre africaine. Il nous raconte la montée au pouvoir du chasseur-président Koyaga, un tyran de la pire espèce qui pille, magouille et tue sans vergogne.
Interprété par quatre comédiens-chanteurs, trois musiciens et un chœur, le spectacle, conçu comme une cérémonie purificatoire, se déroule en quatre tableaux qui représentent quatre veillées, entrecoupées de proverbes. La représentation se passe dans un lieu et un décor uniques. Tous les interprètes sont sur scène. Au centre d'un chœur et des trois musiciens qui accompagnent et veillent au bon déroulement de la cérémonie, se trouvent Koyaga, le président-dictateur, Maclédio, Bingo incarnés par des comédiens-chanteurs ainsi que Tiécoura.
C'est Bingo, un griot de la confrérie des chasseurs et Tiécoura, son répondeur, un initié en phase purificatoire, un fou du roi, à qui reviennent de raconter sans rien omettre la vie du président Koyaga, maître-chasseur et dictateur de la pire espèce. Le récit mêle homme et bêtes sauvages, dénonce les aspects d'ombres et de sang de son règne avec une ironie cruelle et une puissance d'évocation.
Ce conte philosophique est entrecoupé de proverbes africains chantés qui évoquent les animaux, la nature, la vie et la mort. Ces intermèdes, respirations alliant poésie et humour apportent une distance au tragique, ce qui donne encore plus de force et de vivacité au récit.
Plus encore que la violence et la cruauté qui caractérisent l'ensemble des régimes au pouvoir durant ces années, Ahmadou Kourouma stigmatise l'action machiavélique des puissances occidentales qui ont sans vergogne exploité le malheur de millions d'Africains.
Ahmadou Kourouma s'est largement inspiré des différentes dictatures et nous propose ce conte philosophique pour mieux nous faire saisir la complexité de la situation africaine.
Si j'ai choisi d'adapter ce roman, c'est qu'il s'inscrit comme une véritable lumière pour mettre à nu les réalités du pouvoir de l'Afrique d'après les indépendances...
Résumé
Koyaga est le fils de Nadjouma, une grande guerrière et de Tchao, un grand lutteur, le premier homme à avoir rompu le tabou de la nudité de sa tribu pour pouvoir arborer les décorations de guerre qu'il a reçues à Verdun en 1917. Cet acte marque le début de l'exploitation des hommes nus par les colons français. A la naissance de Koyaga, Nadjouma se sent très malade après avoir accouché. Elle se rend chez le marabout Bokano, aux dons de guérisseur, qui l'aide à se rétablir. Ensemble, grâce à la magie, ils vont protéger Koyaga. Très jeune déjà, Koyaga hante les animaux qui vivent là et devient un très grand chasseur. Il débarrasse la population de plusieurs créatures immondes qui terrorisent les villageois.
Koyaga se sent l'âme d'un chef et c'est naturellement qu'il décide de prendre le pouvoir dans le pays en organisant l'assassinat du président Fricassa Santos qu'il remplace. La sorcellerie le protège, l'immunise. Koyaga engage Maclédio comme ministre de l'Orientation. Ensemble, ils parcourent l'Afrique, et font la rencontre de nombreux dictateurs auprès desquels Koyaga prend des leçons de despotisme. Grâce aux pouvoirs que lui confère la magie de sa maman et du marabout Bokano, Koyaga déjoue tous les complots, triomphe de tous ses ennemis. Jusqu'au jour où, s'étant fait passer pour mort, il perd la trace de la maman et du marabout.
C'est alors que Koyaga se souvient de ce que sa maman et le marabout Bokano lui avaient enseigné s'il les perdait : faire dire son récit purificatoire par un griot des chasseurs et son répondeur. Tout avouer, tout reconnaître, sans rien omettre. Ne laisser aucune ombre. Ainsi Koyaga pourrait briguer un nouveau mandat de président avec la certitude d'être réélu. Et si d'aventure les hommes s'avisaient à ne point voter pour lui, les animaux sortiraient de la brousse, se muniraient de bulletin de votes pour le plébisciter.