L'ex-correspondante de BBC au Mali Sadio Kanté est devenue aujourd'hui une artiste peintre. En trois semaines, elle a déjà peint 55 tableaux et ne compte pas s'arrêter en si bon chemin car la peinture serait pour elle un remède contre la Schizophrénie dont elle souffre. Nous l'avons suivi à l'œuvre hier dans son atelier.
Mieux vaut tard que jamais, ce dicton pourrait bien s'appliquer à la nouvelle vie professionnelle de Sadio Kanté dont le génie créateur de l'art vient de se réveiller à l'orée de ses 40 ans. Comment comprendre cette brusque orientation de cette jeune dame connue surtout avec son micro de journaliste, son franc-parler, son style de vie unique etc. Pour tenter de trouver une réponse, nous nous sommes rendus dans sa villa à Badalabougou. C'est là que se trouve son atelier de peinture avec ses matériels et ses supports de travail : tissu creton, peaux ; plaquettes, pinceau, vernis à ongle, 'rouges à lèvres, aiguilles, perles, cauris, ancres de tampon, peinture à eau...
Dans le couloir et dans le salon de sa maison se trouvent exposés plus de 50 tableaux peints par la jeune artiste qui nous explique sa mésaventure « D'abord, il faut dire que je n'ai jamais été à l'école de l'art. Tout cela a commencé le jour où j'ai eu envie de mettre un tableau dans mon salon. J'avais des tissus que j'ai décidé moi-même de peindre et ce jour avec un pinceau et de la peinture à huile ; j'ai fait 4 tableaux. Et je me suis rendu compte que c'est comme une force qui me guidait dans ce travail. Je me sentais délivrée ».
Sadio Kanté explique ce comportement par le fait qu'elle souffre de schizophrénie, psychose caractérisée par une dissociation des différentes fonctions psychiques et mentales accompagnée d'une perte de contact avec la réalité et d'un repli sur soi. C'est ce qui explique selon elle, son comportement bizarre, ses démêlées avec les gardes de corps des présidents et ministres que d'aucuns ont qualifiés de folie : «Il y a des gens qui pensent que je suis droguée, alcoolique et folle. lls se trompent. Seulement j'ai connu une enfance difficile avec les séquelles de mon frère de père qui m'a violée à 11 ans. Je mène une vie simple ; je suis musulmane. Mais je me soulage d'être une troublée mentale que d'être une droguée car les troubles mentaux peuvent être bénéfiques. Donc je demande aux parents dont les enfants souffrent de maux de têtes difficiles de bien s'occuper d'eux car ils sont peut-être tenus par un génie qui peut leur être bénéfique».
Pour Sadio, la peinture a été le remède à sa maladie» Avec la peinture, je suis comme délivrée de quelque chose. Je ne prends plus de médicaments et je n'embête plus mes médecins que j'appelais souvent même à 03 h du matin». La nouvelle peintre travaille à toutes les heures et peut s'enfermer souvent plus de trois heures dans son atelier pour peindre. Ses tableaux dont elle ignore la signification donnent l'image de la guerre ; l'amour, la musique, les catastrophes naturelles etc. « Mes œuvres sont comme mes enfants. Je ferai tout avec ces tableaux sauf les vendre. Je ne peux m'en débarrasser. Le coût de ses tableaux, Sadio n'en compte pas « Je sais que quand je commençais la peinture, j'avais 1,100 million. Mais après les 55 tableaux, je n'avais que 15 000 FCFA».
A la question de savoir si elle arrêtait définitivement avec le métier de journalisme ; elle nous jette sur la figure « Jamais. Ça me fait 13 ans dans ce métier que j'ai commencé à la radio Jamana de Koutiala pour ensuite aller au Burkina, Dakar à Sud FM ; Kledu ; Essor, BBC et je continuerai avec le journalisme. Je suis la correspondante du Service Internet de BBC, Jeune Afrique Economie et du Service AP et j'ai d'autres projets comme le service Internet de RFI, la création de mon site Afrik Femme».
Pour montrer sa créativité au monde entier, Sadio compte organiser dans les prochains jours, avec le CCF des expositions et une conférence de presse.