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LAURÉAT DU PRIX DÉCOUVERTES RFI 2008
Mikea est ce qu'on appelle un auteur, compositeur, interprète. Il a fait le choix de se tourner vers une esthétique simple, à la fois personnelle et universelle, portée par le trio guitare, basse et percussions, trio sur lequel la voix peut s'épanouir librement et mener l'auditeur directement au propos. Mais les inflexions de la voix, son timbre, ses envolées et son langage vont rappeler sans cesse qu'on est à Madagascar. Et le pays de Mikea apparaît aussi sous les couleurs, les sons et les rythmes de la guitare. Ici où là, surgit une flûte légère qui rappelle la sodina de certains rituels. Ou alors ce sont des voix de gorge qui viennent soulever le chant solo et qui font penser à certains chants traditionnels.
Le beko, musique de cérémonies chantée à plusieurs voix, habite aussi le chant de Mikea. Cette tradition s'est glissée vers une fonction nouvelle et des chanteurs comme Mikea ont façonné une chanson sociale sur le style ancestral. On comprend d'emblée cette alchimie adroite entre un passé discrètement perceptible, un ensemble de traditions accessibles aux seuls initiés et une volonté d'ériger le propos en une forme internationalement perceptible pour que passe un constat confié à la chanson.
Mikea chante la solitude, la pauvreté, les valeurs traditionnelles, la terre, le pouvoir abject de l'argent, l'éxil et le mal du pays, la trahison et le vol, la justice, la famille, l'amour évidemment mais aussi la déforestation et les problèmes d'environnement. C'est une sorte de chant d'amour s'élevant de la voix d'un chanteur qui a fait le choix juste de laisser parler une musique profondément subtile même si apparemment évidente. Mikea chante parce que chanter est vital. Il chante pour parler des siens : un chant avec une morale, comme une balade ancienne, comme un blues du fond des bayous, comme un gospel, comme un proverbe africain...
Etienne Bours
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