Habiba Djahnine a longtemps été hantée par le trajet effectué en compagnie de la dépouille de sa sœur Nabila, de la ville de Tizi Ouzou où celle-ci a été assassinée vers Bejaïa où se trouve la maison familiale. Le parcours en voiture et le commentaire de la réalisatrice structure le film du retour, dix ans après, sur les lieux du drame, à la rencontre de parents, amis et voisins pour tenter de comprendre une décennie d'assassinats et de massacres de civils. Pour trouver un exutoire à la douleur, pour que le travail de deuil puisse s'accomplir, pour pouvoir penser enfin que dix années de violence et 200.000 morts n'auront pas servi à rien, pour honorer la mémoire des disparus, pour transformer les cadavres qui encombrent les placards de notre histoire récente en sentinelles de la mémoire. On y entend ainsi la grand-mère, des frères et des sœurs, mais aussi des collègues, des garçons, des filles et des femmes, auprès desquels Nabila a agi en éveilleuse de conscience et qui se souviennent de ses petites attentions, de sa grande sollicitude, de son écoute.
"En 1994, confie Habiba Djahnine qui se trouvait alors à Timimoune dans le sud-ouest algérien, Nabila m'avait écrit une lettre, elle me racontait l'escalade de la violence, la répression, les assassinats, les espoirs si maigres et son désarroi face à l'action quasi impossible en ces années de plomb.". Dix ans après, Habiba qui réside à Paris est retournée au pays pour lui faire une réponse sous la forme d'un film. Lettre à ma sœur se termine sur une interview de Nabila, réalisée au tournant des années 90 par le cinéaste Ahmed Lallem, qui en dit long sur la combativité de l'architecte, militante, syndicaliste et féministe, fauchée dans la fleur de l'âge.
Née en 1968, déléguée générale des Rencontres Cinématographiques de Bejaïa, Habiba Djahnine a pour sa part publié divers textes et articles en France et en Algérie, dont Outre-Mort (2003) un recueil de poésie.
(Confirmation souhaitee PAF 3,00 euros)
à 17h30