"I am The Music, the sound of life all around…" :
Le rap originel des Last Poets, qui ont frappé les imaginations d'une génération, posé les fondations du mouvement hip hop, et rallument la flamme face à la réalité américaine d'aujourd'hui,
La transe rock de l'immense Rachid Taha, "pur fils du tout-monde", étoile dans notre mémoire, qui savait rassembler avec la fougue et l'intelligence du coeur une, deux, trois générations, de toutes origines et classes sociales,
Le souffle libertaire du jazz, qui a offert à chacun le droit de trouver son propre langage et d'explorer de nouvelles voies, des mélodies limpides d'Ornette Coleman revisitées par l'Orchestre National de Jazz et par Novembre, aux fulgurances de Kahil El'Zabar, Thomas de Pourquery Supersonic, Roy Nathanson et Papanosh, Ostrakinda, Un Poco Loco, Sylvain Rifflet et Jon Irabagon, The Wolphonics,
Les grandes voix et consciences de l'Afrique, autant musiciens dans l'âme qu'esprits libres prônant l'émancipation et la résistance, Salif Keita, Bonga, Oumou Sangaré, l'afrobeat survolté et révolté de Seun Kuti ou de ses frêres américains Antibalas, le singulier tropisme éthiopique, jazz, crunch, électronique, Mulatu Astatke, uKanDanZ, Ethiopian Records & Azmari Synthesis,
La nouvelle vague du monde arabe, qui s'est octroyée une longueur d'avance en matière de modernité, Sodassi, Nadah El Shazly, Maurice Louca,
Tous ces explorateurs de sons, qui se ressourcent dans la mémoire ou la tradition pour mieux nous projeter dans le futur, Expeka Trio, No Tongues, Farmers, Magic Malik, Yom et Théo Ceccaldi, Roberto Fonseca, Bassekou Kouyaté, Chloé Bégou et Anil Eraslan, Csaba Palotaï, ou qui sont déjà bien au-delà, dans la quatrième dimension, Eric Chenaux et Bass Clef, Mhysa,
Et enfin, last but not least, les créations collaboratives, Home et Au commencement toujours la forêt, à la fois projets fous, super-productions joyeuses et utopies concrètes où l'art se vit en partage et éclot dans la beauté.
"I am The Music, the sound of life all around" : ce slogan, emprunté à un titre du nouvel album des Last Poets, rappelle s'il en était besoin à quel point la musique reste éminement politique, par sa sidérante acuité quand elle croise la réalité du monde, ou par la liberté radicale des musiciens qui la jouent, quitte à s'affranchir des règles formelles, sociétales ou marchandes en vigueur. Une réjouissante nouvelle, comme une bouffée d'oxygène dans l'air du temps, à vérifier au fil de ce 36ème festival Banlieues Bleues, où celles et ceux qui viennent aux concerts s'engagent un peu, eux aussi.
Xavier Lemettre, directeur de Banlieues Bleues